e m p o r t i é r a g e   a r t i s t i q u e

Notre fragilité universelle

LA FRAGILITÉ est l’état d’une substance qui se fracture lorsqu’on lui impose des contraintes mécaniques ou qu’on lui fait subir des déformations brutales (c’est-à-dire sous forme de choc).

Nous sommes nombreux à avoir déjà fait un long voyage en avion durant lequel la fragilité de notre existence nous saute aux yeux en réalisant qu’à l’extérieur de ce cocon de matériaux composites, tout nous est hostile, que ce soit le froid extrême, l’air raréfié ou, si jamais l’engin tombait, l’horrible éclatement de nos corps au moment de l’impact avec la terre ferme. Lorsqu’on y réfléchit bien pendant quelques secondes, cette immense fragilité nous donne généralement de bonnes sueurs froides, puis, nous nous efforçons de ne plus y penser pour le reste du voyage.

À de nombreuses occasions dans notre vie, nous sommes confrontés à ce genre de fragilité le plus souvent sans nous en rendre compte même lorsque nous demeurons sur le plancher des vaches. Voilà le message inhérent aux œuvres récentes de Gaétan Boulais après qu’il eut pris conscience de sa propre fragilité en tant que cycliste lorsqu’il côtoie, durant ses sorties sportives, les invincibles forteresses de métal que sont automobiles et camions.

Pour lui, la sécurité est devenue le mot d’ordre à respecter pour qu’il ne se décourage pas de pratiquer son sport favori. Le problème des collisions entre vélos et voitures est si répandu qu’il est à l’origine d’un nouveau mot : l’emportiérage!

Inspiré par ce terme nouveau, Gaétan Boulais invente alors l’expression « emportiérage artistique », véritable collision entre une accident réel et l’imaginaire de l’artiste, véritable fusion entre le dessin traditionnel et l’émotion, le tout directement incrusté dans une banale porte de char transformant de ce fait une matière ordinaire en œuvre signifiante!

À l’aide d’un outil habituellement destiné aux mécaniciens, une rectifieuse pneumatique (grinder) et loin des crayons de plomb ou des pastels, outils traditionnels de l’artiste, il laisse sur les portières d’automobiles, des cicatrices telle une marque d’affirmation du cycliste ayant choisi de faire face à l’adversité plutôt que d’y laisser sa peau. Gratter la peinture jusqu’au métal, c’est aussi crier, grincer, claironner et hurler ce besoin inné et inévitable de l’artiste de dessiner, de crayonner et de créer. Triturer ainsi la matière, c’est y mettre toute la force d’une passion inébranlable pour le dessin, dynamisé par l’angoisse et la peur du cycliste fragilisé.

Au finish, à l’image d’une compétition de vélo, le peintre sportif convie le public à des rencontres, des activités et des échanges afin d’augmenter la conscience globale de chacun de nous face à l’enjeu de la sécurité. Ainsi, en intégrant tous les aspects de ses préoccupations en une œuvre totale, Gaétan Boulais vous invite à participer à un véritable acte d’art relationnel.

JOCELYN FISET
Anartiste – Commissaire international – Gestionnaire des arts éphémères

Emportiérage artistique, 2018
Dessin à la rectifieuse
4 portières de voiture
122 x 152 cm (48” x 60”)

DU DESSIN À LA GRAVURE

 

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